Père naturel du peintre Abel de Pujol, Pujol de Mortry (Valenciennes, 1737-1816) embrassa la carrière militaire avant de revenir dans sa ville natale, de s'y marier et d'y occuper des fonctions de commissaire des guerres pour sa région, le Hainaut.

Il devient ensuite prévôt de la ville de Valenciennes à partir de 1782. Graveur amateur, son nom reste avant tout attaché à la fondation de l'Académie de Peinture et de Sculpture, le 9 décembre 1782. La magistrat inscrit ainsi la cité du Hainaut dans "ce vaste mouvement par lequel la Province s'affirme, à partir du milieu du XVIIIe siècle et avec une vitalité toute fraîche, comme une sorte de troisième pouvoir culturel, à côté du Gouvernement et de la ville (Paris)." [Edouard Pommier, L'Académie de Peinture et de Sculpture de Valenciennes, musée des Beaux-Arts de Valenciennes, 1986, p. 6.] Après quelques démêlés avec le comte d'Angiviller et Jean-Baptiste Pierre, directeur de l'Académie royale, l'Académie de Valenciennes obtient son affiliation à celle de Paris le 1er mars 1785. Les peintres Louis Watteau et Olivier Le May furent les premiers académiciens de cette institution qui fondait son enseignement sur l'art du dessin, grâce à des artistes comme Momal et Cadet de Beaupré. 

Amateur et auteur éclairé, Pujol de Mortry, graveur et miniaturiste amateur, fut également un collectionneur réputé : sa bibliothèque ne comptait pas moins de 5300 volumes et il possédait un ensemble de plus de 30 000 estampes et 150 peintures.

Enrichie d'une bibliographie sommaire et d'un catalogue de ses gravures, cette étude monographique constitue ainsi une source rare et précieuse pour la connaissance de la vie artistique provinciale et hennuyère de la fin du XVIIIe siècle et du début du XIXe. 

Pujol de Mortry autorisa finalement son fils naturel-Alexandre-Denis Abel, devenu Prix de Rome de peinture en 1811- à ajouter son patronyme de Pujol : "mis à part ses différents titres à la reconnaissance durable de ses concitoyens, il avait encore su trouver l'infaillible moyen de transmettre son nom à la postérité en le léguant à un homme dont la réputation va s'aggrandissant chaque jour, et qui fait rejaillir sur sa ville natale une partie de l'éclat qui l'environne ; nous cédons au plaisir de nommer encore une fois Abel!" [Arthur Dinaux]